Santiago H. Amigorena
P.O.L., 633 pages, 25€.
Santiago a aimé Philippine comme un fou mais voilà, celle-ci vient de le quitter. Ecrivain, Santiago écrit chaque jour son amour et ce pendant quatre ans après leur séparation. De Paris à Buenos Aires en passant par Patmos, au fil des jours, le sentiment amoureux ne tarit pas et se déverse dans un déluge de mots. Roman fleuve, La première défaite, huit ans après Le premier amour qui contait l'amour partagé avec Philippine, est le roman du désespoir, le roman du souvenir, des larmes qui coulent et sèchent sur les mots. Santiago H. Amigorena poursuit ici son oeuvre autobiographique originale et ambitieuse dans un roman au caractère obsessionnel qui témoigne de son refus de la perte, de l'absence et révèle son goût pour le ressassement. Un livre sur l'effet destructeur des sentiments, nostalgique mais non exempt d'humour.
Mathias Enard
Actes Sud, 252 pages, 21€50.
Lakhdar est un jeune tangérois sans histoires qui rêve de liberté avec son copain Bassam et qui fantasme sur sa cousine Meryem avec laquelle il s'adonne au plaisir. Mais ils sont découverts. Le cauchemar commence alors pour eux. La honte de la famille s'abat sur Lakhdar et Meryem. Lakhdar, bien que très jeune, s'enfuit. Abandonné, à moitié clochard, il retrouve finalement un statut au sein d'un groupe de pensée coranique. Mais à la différence de son ami Bassam, la doxa islamiste n'a pas de prise sur lui. Après un attentat à Marrakech que Lakhdar attribue au groupe, Bassam disparaît et Lakhdar change de vie et pose le pied sur le sol européen. Là encore la vie ne sera pas facile pour Lakhdar.
Rue des voleurs est un roman à vif comme Le pain nu de Mohammed Choukri auquel il rend hommage d'ailleurs. Grâce au souffle épique de Mathias Enard, Rue des voleurs est traversée par une grande force narrative et émotionnelle qui emporte le lecteur dans cette tragédie qui d'ordinaire finit pas s'inscrire dans la grande histoire. A lire.
Michael Ondaatje.Trad. de l'anglais
L'Olivier, 258 pages, 22.50 €
«On ne m'avait pas prévenu que le paquebot comporterait sept ponts, qu'il y aurait six cents personnes à bord, dont un commandant, neuf cuisiniers, des mécaniciens, un vétérinaire, et qu'il renfermerait une petite prison et des piscines chlorées qui vogueraient en notre compagnie sur deux océans.». A l'âge de 11 ans, Michael est envoyé en Angleterre pour y retrouver sa mère. Il quitte donc le Sri Lanka à bord de l'Oronsay, un impressionnant paquebot sur lequel il voyagera vingt un jours, seul. Ce voyage étrange, sans adulte, va vite se transformer en une aventure de tous les instants. Avec deux autres enfants de son âge, Cassius et Ramadhin, il explore chaque recoin du bateau, rencontre des gens étonnants, se mêle aux autres passagers et écoute leurs histoires. Dans ce roman largement autobiographique, Michael Ondaatje revient avec tendresse sur l'un des épisodes les plus marquants de son histoire, l'un de ceux qui ont forgé son regard d'écrivain.
Rebecca Makkai.Trad. de l'anglais
Gallimard, 367 pages, 21 €
Dans la bibliothèque de la petite ville du Middle West où elle travaille, Lucy s'occupe de la section jeunesse. Toujours prête à conseiller les jeunes lecteurs et à animer des ateliers, elle cherche à leur faire partager son goût pour les romans. L'un de ses plus fidèles visiteurs est un jeune garçon de 10 ans, Ian. Il passe ses après-midi à fureter dans les rayons mais ses choix doivent toujours être validés par sa mère, membre d'une église fondamentaliste désireuse de rencontrer Dieu en chaque chose. Ian étouffe sous la coupe de cette mère qui craint que le goût de son fils pour les livres soit un signe précurseur d'un comportement homosexuel et ne souhaite qu'une seule chose, le voir pratiquer un vrai sport de garçon. Un matin, en arrivant à la bibliothèque, Lucy y découvre Ian. Il a fugué et passé la nuit entre les rayons. Bien décidée à le ramener chez lui et à parler avec sa mère, Lucy fait monter Ian dans sa voiture. Mais ce court trajet jusqu'à la maison du garçon va vite se transformer en escapade à travers l'Amérique. L'occasion pour Lucy de revenir sur sa propre enfance dans une famille d'immigrés russes, et pour Ian de découvrir un monde moderne que ses parents refusent de voir. Un roman tendre et amusant.