Nina Léger
Editeur : Gallimard Réserver ou commander
Septembre 2020, Oroville. Nord de la Californie. Thea doit fuir sa maison, n'emportant qu'un maigre sac contenant quelques affaires rassemblées à la hâte. Le feu encercle la ville, menaçant les habitations, détruisant la forêt, semant la peur sur son passage. Bientôt Orovile sera défigurée par l'un de ces gigantesques incendies qui ravagent la région chaque été depuis plusieurs années. La sécheresse, l'exploitation sans cesse croissante de la rivière, l'acharnement des hommes à bétonner auront eu raison de ce coin de paradis. Pourtant tout avait commencé dans la joie lorsqu'en 1848 de l'or fut extrait de la Feather River. Mais la découverte de cette première pépite déclenchera l'inexorable folie des hommes ! Ruée vers l'or, exploitation des ressources naturelles, extermination des peuples autochtones, la machine infernale est en route. Chercheurs d'or, pionniers, aventuriers, ingénieurs, marchands, anthropologues, tous se bousculent et se succèdent dans une course effrénée vers la fortune ou la gloire. Thea, géologue de formation, a compris depuis longtemps que l'homme était capable de détruire son environnement mais elle a aussi appris depuis peu que certains de ses ancêtres avaient pris part à l'histoire d'Oroville. Déterminée à comprendre leur rôle dans cette épopée aussi fantastique que tragique, elle avait quitté San Francisco pour ce petit bout du Nord de la Californie à la recherche de réponses. Elle doit à nouveau fuir et repartir de zéro. Dans ce magnifique roman, Nina Léger nous raconte l'extraordinaire histoire d'une rivière adorée puis malmenée par les hommes qui pendant plus d'un siècle ont tenté de la dompter.
Thibault de Montaigu
Editeur : Albin Michel Réserver ou commander
Emmanuel, playboy flambeur issu de la petite noblesse désargentée, est aujourd'hui un vieil homme aveugle et en très mauvaise santé. Depuis sa résidence-service (où il coule des jours tranquilles sous l'oeil attentif de l'attentionée Nancy), il mandate son fils ainé Thibault, écrivain, pour écrire l'histoire de Louis de Montaigu. Louis était le grand-père d'Emmanuel. Capitaine pendant la première guerre mondiale, il fut l'auteur d'une charge aussi héroïque qu'inutile qui lui couta la vie durant la première guerre mondiale.
A travers ses recherches qui ne l'enchantent guère, Thibault retrace une histoire familiale pleine de rêves de grandeur brisés. Il évoque avec tendresse et justesse la paternité et une transmission loin d'être toujours sereine. Surtout, il écrit Emmanuel depuis l'enfant rêvant au chevalier blanc jusqu'au mourant.
Nous avons aimé ce roman pour son rythme distrayant et son ambiance particulière. "Coeur" n'est pas seulement un récit d'hommes. C'est un récit familial, un récit d'Histoire qui touche et marque.
Pierre Adrian
Editeur : Gallimard Réserver ou commander
Une nouvelle fois, Turin. Une nouvelle fois, la gare centrale. Dans la chaleur d’un été que tout le monde qualifia d’étouffant, Pavese quitta les plages de Bocca di Magra après le 15 août. Pour les gens seuls et tristes, la mi-août doit être aussi dure à vivre que les fêtes de fin d’année. Le 15 août a ses petits airs de réveillon. Il dut exaspérer Pavese qui avait autre chose en tête. En partant, il laissa un mot à ses amis. « Je me sauve parce que j’en ai assez de vos courses après le bonheur, qu’il soit touristique ou autre. (...) I’m fed up. J’en ai plein le dos. » À l’heure où le pays entier était à l’arrêt, les pieds dans l’eau, Pavese se mettait en route. À rebours.
Poignant récit de Pierre Adrian qui relate la dernière année de l’auteur italien Cesare Pavese (qui s’est donné la mort le 27 août 1950), en prise avec la vie. Car il s’agit de cela : d’une lutte permanente avec l’existence, la mélancolie chevillée au corps, le tragique des secondes, d’un temps que l’on n’arrive pas à oublier, et d’un autre où l’on refuse de se projeter. On comprend que Cesare Pavese, grâce aux mots délicats de Pierre Adrian, est en bagarre avec la vie, l’exigence de la littérature, la politique, l’amour.
C’est la vie et la mort, il n’y a plus de frontières entre les deux. Plus de bordures, Pavese se cogne contre les angles de son métier, d’un amour qu’il porte en lui et qu’aucune femme n’aura accueilli. Pavese, c’est une vie passée à côté.
Dans « Hôtel Roma », il y a les dernières semaines de Pavese, mais aussi les errances de Pierre Adrian dans Turin, le Piémont, ses réflexions, ses suppositions et surtout, surtout, au fil des pages, cet amour qu’il porte à Pavese, à ses livres. Rarement, un livre m’aura autant donné envie de découvrir un auteur (je n’avais jamais lu Pavese). Pierre Adrian transforme Pavese en ami, en compagnon. Son ami. Mais il nous dit aussi qu’il peut être le nôtre, le vôtre. Que son intelligence, son esprit, ses visions, son courage peuvent à leur tour nous irradier, et nous rendre meilleurs, et plus sensibles.
Célestin De Meeûs
Editeur : Sous-Sol Réserver ou commander
Célestin de Meeûs, dans son premier roman « Mythologie du .12 », déplie quelques heures d’une soirée de juin dans l’existence de deux personnages. La première partie du livre alterne deux points de vue, celui de Théo accompagné de Max, deux jeunes hommes qui s’ennuient sur le parking d’un supermarché d’une petite ville en Belgique. Ils boivent, fument, discutent, se chambrent. Le temps s’étire, l’ennui avec. Les délires prennent forme, gonflent, se déforment, nihilisent le réel. L’autre point de vue, c’est celui du Docteur Rombouts qui, une fois rentré de l’hôpital où il travaille, va commencer à ressasser sur ses réussites - ses propriétés - et ses échecs, ou plutôt ses frustrations, sa peur de la dépossession et de l’abandon, sa haine de l’autre, de celui ou de celle qui pourrait lui amputer une partie de sa vie ou de ses possessions, qui sont pour lui, la même chose.
La tragédie est en route, la deuxième partie se déploie alors avec une puissance de crescendo dramatique et poétique d’une grande beauté anxiogène. L’ivresse, la colère, la frustration progressent, s’alimentent, explosent au fil des minutes.
Si la trame du roman est d’une grande simplicité - voulue - , « Mythologie du .12 » assume une esthétique et une forme romanesque très fortes. Avec les circonlocutions de son écriture, Célestin de Meeûs a une manière d’encercler par son langage poétique des situations ou des émotions. Les phrases s’élancent, glissent, rejoignent un personnage à l’autre (la deuxième partie est phénoménale). Il a trouvé une forme pour dire quelque chose du monde, son épaisseur, c’est à dire ironiquement sa vacuité, ses vanités. Les phrases, pleines et majestueuses, en mouvement et chorégraphiées, prennent en charge les thématiques du vide, de l’ennui, de la solitude, creusets des colères et de la violence.
Les dernières pages, et la fin, particulièrement réussie, laissent exsangue. On a vu dans ces pages, malgré tout, la beauté de la nature, sa luxuriance, les arbres, sa forêt, ses ressources, et le ciel et ses lumières.
Et ses hommes à la fois vides et plein de haine et de désespoir. Jusqu’à l’absurde et à la fatalité.