" Quand elle se souviendra de ce moment, plus tard, elle le trouvera d'une intensité insoutenable, elle en est consciente à ce moment précis. Elle n'a jamais cru pouvoir être aimée par quelqu'un. Mais désormais elle mène une nouvelle vie, inaugurée par l'instant présent, et même des années plus tard, elle se dira : Oui, c'était ça, le commencement de ma vie."
D'abord, il y a Marianne. Issue d'une très bonne famille, c'est une jeune-fille brillante, fragile, inquiète. Elle est à la fois le vilain petit canard et le cygne de cette histoire. Et puis, il y a Connell, jeune-homme intelligent et sensible. Lui, est populaire au sein de son équipe de foot. Marianne, elle, est la paria du lycée. Pourtant, ils vont tisser à leur façon un lien indescriptible. Le roman va les suivre durant quatre ans, du lycée jusqu'à leurs études universitaires à Dublin où les rôles s'inverseront. Connell va éprouver difficulté et anxiété à s'intégrer tandis que Marianne aura plus de facilité à s'épanouir. Tout au long de ce délicat roman, Marianne et Connell vont dessiner un pas de deux, une sorte de tango amoureux aussi beau que douloureux. Sally Rooney dépeint avec une belle délicatesse la fin de l'adolescence, l'incertitude, l'incommunicabilité, la détresse psychologique, le partage d'intimité et parvient en quelques phrases à nous vriller le coeur. En mettant à nu tout à la fois la fusion et les dissonances de ses personnages, l'auteure fait preuve d'un sens remarquable de la psychologie. Doté d'une écriture ultra-contemporaine (à la fois blanche et enrobante, presque cotonneuse) et d'une réflexion subtile sur les différences de classes sociales, Normal People est d'une justesse absolue.
Jung Chang, autrice des Cygnes Sauvages, s'est intéressé au destin extraordinaire des sœurs Song. Ailing, Quinling et Meiling Song ont toutes les trois joué un rôle majeur dans l'histoire politique de la Chine du XXe siècle. Nées à la toute fin du XIXe siècle, envoyées très jeunes étudier en Amérique, elles maitrisaient parfaitement l'anglais et étaient très cultivées. Elles affichaient une allure très occidentale, n'ayant pas eu les pieds bandés (comme cela était encore la tradition dans la Chine de leur enfance) elles avaient une démarche fière et assurée contrairement aux femmes de leur génération. Rentrées au pays, elles s'imposèrent rapidement dans la société locale et s'intéressèrent aux affaires politiques et commerciales. L'aînée, Ailing, était une redoutable femme d'affaires qui, grâce à l'influence qu'elle exerçait sur Chiang Kai-shek a contribué à l'enrichissement de sa famille, la plus riche de Chine. Quinling fut l'épouse de Sun Yat-sen, connu comme le père de la Chine moderne, qui fut le premier président du pays en 1912. Surnommée Sœur Rouge, elle s'allia aux communistes et fut vice-présidente de la Chine sous Mao. La benjamine, Meiling était l'épouse de Chiang Kai-shek, le Généralissime. A l'arrivée des communistes au pouvoir en 1949, Ailing et Meiling quittèrent leur pays, tandis que Qinling devenait l'une des figures marquantes de la Chine maoïste. Ce n'est qu'en 2003, à l'âge de 105 ans, que s'éteint Meiling, la dernière des sœurs Song, mettant ainsi fin à la saga d'une famille hors du commun. En retraçant la vie privée et publique de la famille Song, Jung Chang nous offre un portrait passionnant de la Chine tout au long du XXe siècle, une période faites de révolutions, d'intrigues et de guerres.
Emuna Elon, traduit de l'hébreu par Katherine Werchowski
Yoël Blum, écrivain israélien reconnu mondialement, est invité à Amsterdam afin de rencontrer ses lecteurs hollandais à l'occasion de la traduction néerlandaise d'un de ses romans. Yoël a l'habitude des tournées de promotion et aime ces moments de partage dans des librairies ou des centres culturels. Mais, là, il hésite. Amsterdam, c'est sa ville natale. Là où ses parents se sont mariés, ont fondé leur famille, ont travaillé à l'hôpital juif comme médecin et infirmière. Mais c'est aussi là que sa famille a été persécutée, que son père a été arrêté puis déporté pendant la Seconde Guerre. C'est la ville que sa mère, sa sœur et lui, bébé, ont fui, embarquant pour une terre d'exil. En Israël, ils ont vécu à trois, sans jamais évoquer le passé. Sa mère ne lui a dit qu'une chose : "Ne Retourne jamais là-bas !" Alors, même s'il approche de la soixantaine, s'il est père et même grand-père, qu'il se sent profondément israélien, il hésite à désobéir à cette injonction entendue toute sa vie. Sa femme parvient cependant à le convaincre. Que risque-t-il tant d'années après la guerre ? Il ne connait personne dans cette ville. Yoël Blum accepte donc l'invitation et se rend à Amsterdam. Il assistera à la réception donnée en son honneur et en profitera pour visiter la ville au riche passé historique et aux musées d'art mondialement réputés. Sur place, sa femme l'entraîne au Musée historique juif. Au détour d'une salle, ils tombent sur un petit film en noir et blanc montrant un mariage dans la communauté juive. Et là, parmi les visages des invités à la noce, il reconnaît sa mère, son père disparu, sa sœur Néti qui n'est encore qu'une petite fille et un bébé aux cheveux blonds blotti dans les bras de sa mère. Qui est cet enfant ? Certainement pas lui. Avait-il un frère dont on ne lui a jamais parlé ? Bien décidé à élucider ce mystère, Yoël contacte sa sœur qui va enfin accepter de lui révéler tout un pan de son passé. Un secret bien gardé qui va bouleverser la vie de l'écrivain. Sans attendre il repart à Amsterdam sur les traces de sa propre histoire.
Lazare est professeur d'histoire dans un lycée parisien. Un jour, sa compagne lui annonce qu'elle part voir ses parents à La Rochelle. Les jours passent et Béatrice ne revient pas. Elle ne répond pas à ses messages téléphoniques non plus. Lazare commence à se questionner jusqu'au jour où il apprend qu'elle ne reviendra pas. Lazare rencontre Lucie, une voisine, qui travaille sur la disparition des moineaux à Paris. Lazare a du mal à se sentir en adéquation avec les valeurs actuelles. Lorsque son ami Saint-Roy meurt brutalement dans un accident de voiture, Lazare sombre dans la mélancolie voire dans la dépression. C'est l'été et il décide de partir à la campagne chez Xavier le frère forestier de son ami Walter pour se refaire une santé.
A la recherche de sens, Lazare va trouver auprès de Xavier et ses comparses la voie de la spiritualité et du coup de la joie.
Ce monde est tellement beau de Sébastien Lapaque est un beau roman, lucide, intelligent, très bien écrit et au final lumineux.