Douglas Stuart, trad. de l’anglais (Ecosse) par Charles Bonnot
Editions Globe, 23€90, 496 p.
Véritable coup de coeur !
On est en en Ecosse, à Glasgow dans les années 80 sous le règne de Margaret Thatcher. Plongé au coeur d’un océan noir, visqueux, asphyxiant, celui de la pauvreté, du chômage, de l’alcoolisme, Shuggie Bain est cet enfant qui sans cesse se débat. Contre les autres d’abord, qui le considèrent comme différent, contre sa mère, ensuite, Agnès, qui ne fait que de tomber, de plus en plus fort, de plus en plus bas. Détruite par les verres qu’elle boit du matin jusqu’au soir, bientôt délaissée de tous, sauf de son fils, à la fois sidéré et en totale adoration pour elle. Obstiné, il tentera chaque jour de la sauver. Quel roman bouleversant que ce « Livre de ma mère ». C’est une œuvre étouffante, physique, martelante où chaque mot est vivant, coupant, sec tout comme le sont les décors, les dialogues, qui cognent sans cesse le lecteur. C’est un roman qui ne renonce à aucun abime et fait sentir admirablement la crasse, la misère, l’alcool, la haine, et s’acharne à le dire, à le répéter, comme la pauvreté s’acharne sur Shuggie et sa famille. Longtemps , nous nous souviendrons du sauveur Shuggie et de son amour obstiné, mais plus encore de sa mère. Quel grand personnage que cette Agnès. Rarement, un tel personnage aura provoqué autant de kaléidoscope d’émotions, coupantes comme du verre brisé. Elle est effroyable, terrible et en même temps, Douglas Stuart la rend mythique grâce à ses mille variations, chacun de ses pas, chaque seconde qu’elle passe sur terre, noyée dans un verre. Car, tout comme l’alcool qui se cache partout dans les maisons, l’humanité dans ce livre, se fait secrète mais elle est là, battante. On la cherche partout, il faut presque creuser pour la trouver mais elle est là, soudain cette humanité, au détour d’un geste , d’un mot, d’une phrase et parce que c’est bref, c’est forcément foudroyant et terriblement beau. Enfin, le plus bouleversant dans ce roman, c’est qu’on y trouve des enfants mais d’enfance, jamais. Il ne peut y avoir d’enfance dans cette cité ouvrière de Glasgow. Et c’est si bien dit, si bien écrit, avec une telle authenticité, que notre coeur, infiniment, se serre.
Dans La carte postale, Anne Berest retrace l'histoire de sa famille maternelle et plus particulièrement celle de sa grand-mère, Myriam, la seule à avoir échappé à la déportation tandis que ses parents, son frère et sa soeur ne reviendront pas des camps de la mort. C'est une étrange carte postale arrivée un matin de décembre 2003 dans la boîte aux lettres de Lélia, la mère de l'autrice, qui, la première, va éveiller la curiosité de la jeune Anne. La carte n'est pas signée et ne comporte rien d'autre que quatre prénoms : Ephraïm, Emma, Noémie et Jacques. Ce sont les grands-parents, grand-oncle et grand-tante maternels de Lélia dont on ne parle jamais. Tous sont morts à Auschwitz en 1942. Seule Myriam, l'aînée de la fratrie a survécu à la Shoah. Il faudra encore attendre vingt ans avant qu'Anne Berest ne décide de s'intéresser au parcours de sa grand-mère et surtout à cette carte pour le moins intrigante. Qui l'a envoyée ? Dans quel but ? Epaulée par Lélia qui a rassemblé de nombreux documents sur sa famille maternelle, Anne Berest se lance dans une enquête minutieuse qui la fera remonter aux origines de cette famille au destin souvent tragique.
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Qui est-on vraiment ? Comment peut-on se définir ? A quelle famille appartient-on ? Quelles sont nos racines et à quel point influencent-elles nos vies ? Voilà autant de questions auxquelles nous confronte le roman de Cinzia Leone à travers trois récits sur des époques différentes. Tout commence par une nuit tragique, à Jaffa, en 1936. Les Juifs de la ville sont traqués dans les rues, certains sont assassinés dans leur maison. Parmi eux, Avraham, un marchand réputé, son épouse Myriam et leur fillette, victimes innocentes d'une révolte sanglante. Cette nuit-là, dans l'appartement du dessus, Ibrahim, l'associé musulman d'Avraham, sa femme Miriam et leur petite fille n'interviennent pas. Pire, Ibrahim voit là une opportunité ! Lui l'entrepreneur raté qui fuit les dettes et le déshonneur était jaloux de la réussite de son patron. En y regardant bien, il lui ressemble un peu et sa femme porte le même prénom, leurs filles ont le même âge. Ibrahim s'introduit chez son ami, lui dérobe un important contrat et décide de refaire sa vie loin de Jaffa, sous une nouvelle identité. Il sera désormais Avraham, un riche négociant juif à qui tout réussi. Mais cet acte impulsif ne sera pas sans conséquences pour les générations futures. Car changer son destin n'est pas chose facile.