Slava : après la chute de Pierre-Henry Gomont (Dargaud, 20€50) : Au coeur de la Russie des années 1990, dans un bâtiment abandonné, Dimitri Lavrine, un trafiquant sans scrupules, et Slava Segalov, un ancien étudiant en arts idéaliste, tentent de mettre la main sur toutes sortes d'objets pour les revendre. Mais rien ne se passe comme prévu... Un road-movie rocambolesque et trépidant, des personnages pittoresques, lamentables ou drôles font de cette BD un must absolu de l'humour et de l'aventure. On en redemande !
Merel de Clara Lodewick (Dupuis, 24€) : Merel, quadragénaire célibataire, partage son temps libre entre l'élevage de canards, le club de football et l'écriture. Son existence paisible est bouleversée le soir où elle fait une blague sur la sexualité du mari de l'une de ses voisines. Dès lors, une rumeur court à son sujet selon laquelle elle aurait des relations sexuelles avec tous les hommes du village... Clara Lodewick, jeune dessinatrice belge, nous offre une histoire épatante de maturité sur les faiblesses de l'être humain. Son récit, sensible, explore le thème de la rumeur. Jusqu'à quel point peut-elle tout dévaster ? Grâce à des dessins semi-réalistes (on pense à ceux de Camille Jourdy), Merel marque durablement le lecteur grâce à la finesse de sa psychologie. Un vrai coup de coeur !
Breakwater de Katriona Chapman (Futuropolis, 21€) : Le Breakwater, ce cinéma de Brighton, a définitivement connu des jours meilleurs : autrefois grande et somptueuse cette salle est désormais vide à l'exception des souris, des oiseaux, des employés occasionnels en pause, et de quelques rares spectateurs habitués. Assez étrangement, cependant, il est toujours en activité, détenu de manière indépendante par un vieil alcoolique. Chris est une femme introvertie d'une quarantaine d'années, isolée socialement et sous-employée, apparemment par choix, dont les rêves d'un diplôme en travail social sont depuis longtemps derrière elle. Mais, lorsque le nouveau venu Dan commence à travailler au Breakwater, il ravive le désir en elle de retourner peut-être à ses études et faire autre chose de sa vie malgré - ou peut-être à cause de - leurs différences évidentes. Au fil des jours, une amitié va naître... Finesse et élégance sont les maître-mots de ce roman graphique tout en douceur et en mélancolie. Sur un thème peu exploité en Bd , l'amitié professionnelle, et souligné par un noir et blanc superbe, l'autrice Katriona Chapman, nous offre une histoire intimiste et bouleversante d'une grâce inouïe. A découvrir absolument !
Hoka Hey de Neyef (Rue de Sèvres/ Label 619, 22€90) : Jeune Lakota élevé par le pasteur blanc qui administre sa réserve, Georges rêve de devenir médecin, le premier parmi les indiens... Il croise la route de Little Knife, Amérindien froid et violent à la recherche du meurtrier de sa mère. Accompagné de ses deux comparses, ce dernier arrache Georges à sa vie et l'embarque dans sa vengeance. Pendant quelques jours, Georges va suivre les trois hors-la-loi qui vont lui apprendre ce qu'est la culture Lakota, et sa culture qu'il a oublié... A travers les magnifiques paysages de l'Ouest sauvage, Hoka Hey nous offre, grâce à un travail graphique somptueux, une histoire de vengeance et d'assimilation culturelle entre blancs et indiens. Un western au top !
Perpendiculaire au soleil de Valentine Cuny-Le Callet (Delcourt, 34€95) : En 2016, à 19 ans, Valentine Cuny-Le Callet débute une correspondance avec Renaldo McGirth, incarcéré depuis plus de dix ans en Floride pour un meurtre commis à l'âge de 18 ans. De ces échanges épistolaires puis des visites en prison naît ce projet de récit graphique, montrant la brutalité du système carcéral et la détermination des condamnés à construire leur vie malgré tout. Un roman graphique d'une puissance rare et un témoignage sur le système carcéral américain. Grâce à des illustrations inoubliables (crayon et gravure sur bois), Perpendiculaire au soleil devient au fil des pages un hommage à la vie, à l'art et à la lutte.
Journal inquiet d'Istanbul d'Ersin Karabulut (Dargaud, 23€) : Auteur turc de bande dessinée, Ersin Karabulut retrace son parcours d'artiste et de citoyen lambda tout en brossant le portrait d'un pays tiraillé par des antagonismes politiques et sociétaux profonds. A travers son histoire, il alerte sur l'importance de la liberté d'expression et de la liberté de la presse dans la Turquie d'Erdogan. Piquante, vive et drôle, cette BD qui entre en écho avec celle de Riad Satouf, L'arabe du futur, est une réussite totale et un témoignage passionnant et courageux. Une BD qui réveille !
Un pied au paradis de Michele Foletti (Sarbacane, 26€) : Oconee, comté rural des Appalaches du Sud, années 1950. Holland Winchester a mystérieusement disparu. Sa mère est persuadée qu'il a été assassiné. Etudiant tout à tour le point de vue du shérif, du suspect, de son épouse, Un pied au paradis (adapté du roman eponyme de Ron Rash) est une Bd qui fait mouche grâce à la qualité de son scénario et de sa construction. On pense à Steinbeck en la lisant, preuve de sa beauté !
La dernière reine de Jean-Marc Rochette (Casterman, 30€) : Gueule cassée de la guerre 1914-1918, Edouard Roux se réfugie dans l'atelier de la sculptrice animalière Jeanne Sauvage, qui lui redonne un visage et l'introduit dans le milieu artistique de Montmartre. En échange, Edouard lui fait découvrir le plateau du Vercors et l'histoire du dernier ours qu'il a vu tué lorsqu'il était enfant. Hymne aux forêts, à l'amour et à la vie sauvage, une BD remarquable tant par ses dessins (ce blanc virginal et ce bleu !) que son scénario, véritablement somptueux. Un des grands titres de cette année !
Les pizzlys de Jérémie Moreau (Delcourt, 29€95) : Chauffeur Uber à Paris, Nathan travaille d'arrache-pied pour subvenir aux besoins de son frère et de sa soeur. Privé de GPS lorsque son téléphone tombe en panne, il est victime d'un accident. Sa dernière cliente, Annie, l'invite alors à venir vivre en forêt au coeur de l'Alaska... Jérémie Moreau, dans ce splendide roman graphique raconte les hommes, la nature, ses fondements, et explore avec brio le XXIième siècle et ses contradictions. Les pizzlys est LA bd de cette fin d'année et nous offre un sublime voyage vers le Grand Nord américain au cœur des mythes des Amérindiens d'Alaska. Un magnifique récit onirique et écologique.
Cache-cache bâton d'Emmanuel Lepage (Futuropolis, 22€90) : De la première à la dernière de ces 302 pages sublimes, en enquêtant sur la communauté dans laquelle il a grandi en Bretagne, l'auteur Emmanuel Lepage interroge notre place, notre identité. D’où venons-nous ? « On est de son enfance » : la sienne découle du rêve un peu fou de ses parents et de cinq couples, qui ont voulu inventer une nouvelle manière de vivre ensemble dans un habitat partagé, près de Rennes, dans les années 1970. En partant de son récit familial, Emmanuel Lepage y mène une grande enquête à la fois intime et universelle et explore ainsi l’enfance, le partage, l’engagement et la transmission. Une BD documentaire qui vous marquera durablement. Et graphiquement, ça n'a jamais été aussi superbe.
Abattoir 5 ou la croisade des enfants de Kurt Vonnegut, Ryan North et Albert Monteys (Seuil/Du sous-sol, 23€) : Billy Pilgrim mène plusieurs existences simultanées dans le temps et l'espace. Il est ce vieil opticien qui perd la tête, ce tout jeune vétéran qui revit sa lune de miel et cet humain que les Trafalmadoriens ont kidnappé pour le présenter dans un zoo. Mais il est surtout ce soldat américain prisonnier dans un abattoir de Dresde pendant le bombardement de la ville et sa destruction totale en 1945. Amer, acerbe, drôle, ce roman graphique est une exceptionnelle adaptation du classique de la science fiction de Kurt Vonnegut et une vision tragiquement burlesque de la guerre.
Le grand livre du climat, Greta Thunberg (sous la dir.) (Calmann-Levy, 464 pages, 32€) : Véritable ouvrage de référence sur les enjeux écologiques de notre société, Le Grand Livre du Climat rassemble des contributions de plus de cent experts, écrivains, activistes et scientifiques internationaux. Comprendre, analyser et agir, telles sont les lignes directrices de tous les articles qui composent cet imposant recueil.
Le dessous des cartes : le retour de la guerre, Emilie Aubry et Frank Tétart (Tallandier, 223 pages, 18€90) : Entièrement mise à jour et proposant un regard centré sur les tensions géopolitiques actuelles, la nouvelle édition du Dessous des Cartes nous aide à mieux comprendre le monde contemporain grâce à des cartes et graphiques clairs.
Citoyen du monde, Amartya Sen (Odile Jacob, 486 pages, 26€90) : Amartya Sen, lauréat du Prix Nobel d’Economie en 1998, revient sur son parcours et sur la façon dont celui-ci a influencé sa pensée. Issu d’une famille du Bengladesh, c’est en Inde qu’il grandit et commence sa formation avant de partir pour le Trinity College de Cambridge. Se référant aux grands penseurs, philosophes et économistes de l’histoire, tant orientaux qu’occidentaux, il dresse aussi un portrait de l’Inde et nous donne des clés pour comprendre les grands enjeux économiques.
Mythos, Stephen Fry (Calmann-Levy, 428 pages, 21€90) : Passionné depuis l'enfance par la mythologie grecque, Stephen Fry, comédien, présentateur et réalisateur anglais de renom, nous invite à (re)découvrir l'histoire de ces héros légendaires. Grâce aux talents de conteur de l'auteur, ils prennent véritablement vie devant nos yeux.
Les cités disparues : voyage insolite aux origines de nos civilisations, Annalee Newitz (Calmann-Levy, 361 pages, 22€50) : L'histoire regorge de mythes autour de villes disparues, de civilisations englouties ou d'aventuriers partis à la recherche de cités d'or enfouies dans la jungle. Si nombre d'entre elles relèvent du fantasme, d'autres ont réellement existées, se sont développées, ont été désertées puis oubliées avant d'être redécouvertes puis étudiées par des archéologues. Annalee Newitz s'est intéressée à quatre de ces cités disparues : Catal Höyük en Turquie, Pompéi en Italie, Angkor au Cambodge et Cahokia aux Etats-Unis. Si elles connurent des fins très différentes, ces quatre villes partagent un même point de rupture qui précipitera leur chute.
L'épicerie du monde : la mondialisation par les produits alimentaires, Pierre Singaravélou et Sylvain Venayre (dir.) (Fayard, 428 pages, 25€) : De nos jours les magasins regorgent de produits venus des quatre coins du monde. Dans toutes les grandes villes on peut manger dans des restaurants proposant des plats au noms exotiques. Ce qui aujourd'hui semble faire partie intégrante de notre quotidien résulte, en réalité, des échanges
commerciaux qui ont façonnés notre histoire au fil du temps. A travers plus de 80 aliments emblématiques de cette mondialisation des saveurs, les auteurs nous proposent un voyage gustatif et instructif.
Les disparus de Gatti de Gamond, Frédéric Dambreville (CFC, 800 pages, 28€) : Ce livre retrace la longue et minutieuse enquête menée par Frédéric Dambreville afin de retracer un évènement tragique de la Seconde Guerre Mondiale. Le 12 juin 1943, une rafle d'enfants et d'adultes juifs réfugiés au pensionnat Gatti de Gamond à Bruxelles entrainera leur déportation à Auschwitz. Si l'auteur, peintre et graveur, s'intéresse à cet événement, c'est qu'il habite aujourd'hui dans les bâtiments ou le drame s'est joué. C'est une inscription gravée sur la cheminée de son salon qui déclenchera le fil de cette longue bobine qu'il mettra des années à démêler.
Guédelon, nous bâtissons un château fort, Collectif (Ouest France, 160 pages, 17€50) : Depuis vingt-cinq ans, une équipe de passionnés s'active sur le chantier médiéval expérimental de Guédelon dans l'Yonne. Archéologues, historiens, chercheurs, artisans travaillent de concert afin de bâtir
un château fort selon les techniques du Moyen Age. Tout est produit avec les ressources trouvées sur place : roches du sous-sol, arbres de la forêt, pigments minéraux ou végétaux... Il faut recréer les outils ancestraux, tailler les pierres à l'ancienne... L'enthousiasme et la rigueur des équipes s'affichent au fil des pages de cet ouvrage qui retrace le quotidien de ce chantier hors normes.
La mer, 5000 ans d'histoire, André Zysberg (dir.) (Les Arènes, 623 pages, 29€90) : Rassemblant plus de 50 articles parus dans la Revue L'Histoire entre 1981 et 2021 et consacrés aux rapports entre l'homme et la mer de la Préhistoire à nos jours, cet ouvrage dresse un panorama complet de ce vaste sujet. Il s'articule autour de sept grands thèmes : l'art de la navigation, les explorateurs et aventuriers, vivre sur la mer, la guerre maritime, les thalassocraties, les ressources de la mer et les mythes autour de la mer.
Atlas historique de la Terre, Christian Grataloup (Les Arènes, 337 pages, 29€90): Après le formidable succès de l’Atlas Historique Mondial, Christian Grataloup présente l’Atlas Historique de la Terre. Un ouvrage remarquable qui mêle la vision d’historiens, d’archéologues, de biologistes,
d’astrophysiciens, afin de nous proposer grâce à des cartes et infographies claires une histoire de la Terre et de son occupation depuis le Big Bang jusqu’à l’ère moderne.
L'art des Chrétiens d'Orient : de l'Euphrate au Nil, Raphaëlle Ziadé (Citadelles et Mazenod, 592 pages, 210€) : Ce superbe livre sous coffret présente un panorama complet de l’art des Chrétiens d’Orient. Ces communautés chrétiennes du Proche-Orient, de Mésopotamie, d’Egypte, de Palestine ont développé un art spécifique qui s’exprime sous toutes les formes : architecture, mosaïques, orfèvrerie, ivoires, enluminures, icônes, textiles.
Blanc : histoire d'une couleur, Michel Pastoureau (Seuil, 238 pages, 39€90) : Michel Pastoureau poursuit son histoire sociale et culturelle des couleurs commencée il y a plus de 20 ans déjà. Le nouvel opus de la série est consacré au Blanc. Considéré comme une couleur à part entière de l'Antiquité au Moyen Age, le blanc n'est pas seulement l'opposé du Noir. Il possède une
symbolique propre : pureté, innocence, sagesse,..et parfois mort. Toujours aussi richement illustré et documenté, ce sixième volet après le Bleu, le Noir, le Vert, le Rouge et le Jaune est particulièrement intéressant.
Les Cartier, Francesca Cartier Brickell (Les Arènes, 616 pages, 26€90) : "Ne jamais copier, toujours créer" telle est la devise de la maison Cartier depuis que les trois petits-fils du fondateur ont repris la bijouterie artisanale fondée en 1847 pour en faire une joaillerie de luxe. Louis à Paris, Pierre à New York et Jacques à Londres, les trois frères n'auront de cesse d'unir leurs talents de
créateur ou d'entrepreneur pour faire rayonner leur nom auprès des plus grands de ce monde. Francesca Cartier Brickell retrace l'histoire passionnante et mouvementée de sa famille.
Des maisons pour sauver le monde, Courtenay Smith et Sean Topham (Parenthèses, 256 pages, 39€) : Face aux défis climatiques, énergétiques, démographiques ou encore économiques de notre société, les architectes doivent développer de nouvelles stratégies de constructions. Des maisons pour sauver le monde propose environ 150 réalisations à travers le monde. L’ouvrage est articulé autour de 19 verbes représentatifs des enjeux actuels : intégrer, démocratiser, flotter, préserver, réemployer, etc.
Les femmes artistes sont de plus en plus dangereuses, Laure Adler et Camille Viéville (Flammarion, 144 pages, 29€90) : Il y a 4 ans paraissait l’ouvrage de Laure Adler Les femmes artistes sont dangereuses. Celui-ci s’inscrivait dans une collection comprenant Les femmes qui écrivent vivent dangereusement et Les femmes qui aiment sont dangereuses. Voici donc un nouveau volet de cette passionnante série. Intitulé Les femmes artistes sont de plus en plus dangereuses, il présente le portrait d’une cinquantained’artistes du XIXe siècle à nos jours, des femmes aux parcours exceptionnels, qui ont bien souvent dû se battre pour être reconnues.
Les plus belles bibliothèques du monde, Collectif (EPA, 301 pages, 45€): Partez en voyage à la découverte des plus belles bibliothèques du monde. Qu’elles soient en France, au Royaume-Uni, en Egypte, en Indonésie, aux Etats-Unis, ce sont 54 merveilles d’architecture et de design qui sont ici présentées. On y côtoie des lieux anciens empreints d’histoire et des réalisations modernes pleines d’audace, des espaces gigantesques et des lieux plus modestes.