Louis Wolfson
Ma mère musicienne, est morte de maladie maligne à minuit, mardi à mercredi, au milieu du mois de mai mill977 au mouroir Memorial à Manhattan.
(ed. Attila, 19 euro)
L'auteur du Schizo et les langues, ouvrage salué par Queneau, Deleuze, Le Clézio, ... raconte ici la chronique d’une mort maternelle. Il fait le récit d’un marginal qui doit simultanément faire face à la mort de sa mère et à la fin d’une tutelle d’un demi siècle. Ce qui ne pourrait être qu'un récit de vie, un témoignage, devient une oeuvre importante par l'utilisation que Louis Wolfson fait de la langue.
Une langue qu'il brise, casse, passe à la moulinette de ses obsessions. Le français est pour lui une langue d'émancipation qui lui permet d'échapper à la langue maternelle.
L'auteur, installé à Porto Rico est devenu millionnaire en 2003 en gagnant à une loterie électronique. Il est relativement riche, attend la fin du monde et écrit toujours.
Frédéric Worms est professeur de philosophie à Lille et à Paris (ENS). Il est spécialiste de Bergson. Et il signe un des ouvrages les plus stimulants de ces derniers mois : Revivre (ed. Flammarion). Pourquoi stimulant ? Car au lieu de nous servir un nouveau discours sur le bien-être, il nous propose un art de vivre ; non pas celui qui va nous faire porter bien ; mais mieux.
Revivre c'est renaître, mais c'est aussi voir resurgir « un passé qui ne passe pas ».
C'est à partir de cette double expérience que Frédéric Worms pense et nous invite à penser.
« un art de vivre, c'est-à-dire de revivre, qui pourrait bien être le seul possible aujourd'hui. »
Marc Crépon
Cerf, collection Passages, 274 p., 34€
« Cet essai est remarquable à plusieurs titres. Son point de départ semble évident, mais il est peu mis en lumière, encore moins approfondi. On constate pourtant aisément une faille majeure dans notre rapport au monde. D'un côté, cette conviction unanime : la solidarité humaine ne souffre aucune exception - toute atrocité, toute douleur, toute offense, où qu'elles soient, exigent soin et secours. De l'autre côté, sans exception aussi, chacun introduit des lignes de partage dans cette universalité affichée, admettant que ce qui se passe ailleurs, au loin, chez les autres, n'ait pas la même gravité qu'ici, chez nous... De cette incohérence à la fois grave et banale, comment peut-on sortir ? Telle est la question que Marc Crépon s'emploie à creuser, en refusant le pacifisme à tous crins, qui n'est qu'un leurre dangereux, tout comme la résignation désabusée qui se borne à légitimer le consentement au meurtre. Les quatre pistes qu'il propose sont des contre-feux plutôt que de vraies issues de secours. Ce sont la révolte sans oeillères, telle qu'Albert Camus la met en lumière, la bonté 'folle' dont parle Vassili Grossman, la critique acerbe qu'incarne Karl Kraus, la honte de ce que l'humain fait à son semblable, telle que l'expriment Kenzaburô Ôé ou Gunther Anders. » écrit Roger Pol-Droit dans le monde du 23 février 2012.