"Au contraire, quand une machine devient inutilisable et que je décide immédiatement de l éteindre pour passer à une autre, je me sens comme un membre à part entière de la société, qui fait un choix dans son travail. Seulement, bien sûr, ce sentiment ne dure pas. Dès le deuxième jour, mon travail n'a plus de secret pour moi et, hormis dysfonctionnement important, je n'ai plus besoin d'utiliser un neurone."
Le premier roman d'Hiroko Oyamada traduit en français se déroule dans une usine immense, qu'on dira "générique" - l'autrice ne donnera aucune information sur ce qui y est produit -. Trois employés récemment engagés y expérimentent la vanité, l'absurdité et l'effarement d'un travail inutile. Cet effroyable portrait de l'aliénation au travail nous laisse presque sans voix, un sentiment de reddition dans l'air. Mais, en contrepoint total et dans un réflexe de survie, il nous incite à réintégrer la notion de "sens" au fond de nos actes et pensées.
L'usine
Hiroko Oyamada, trad. du japonais par Silvain Chupin
Christian Bourgois, 186 p., 18€50