Emmanuel Dongala
Actes Sud, 333 pages, 22.50€
Dans ce très beau roman, Emmanuel Dongala se penche sur le destin hors du commun d'un violoniste de grand talent oublié de l'histoire, George Bridgetower. Le jeune George est le fils de "Frederik de Augustus Bridgetower de Bridgetown Prince d'Abyssinie" comme se fait appeler son père. En réalité Frederik n'est pas un noble, encore moins un prince, c'est le descendant d'une famille d'esclaves de la Barbade. Un mulâtre arrivé jeune et libre en Europe et qui a su, grâce à ses talents d'interprète, se hisser au rang de serviteur du prince Esterhazy à Vienne. À la cour, il a côtoyé les intellectuels et les artistes qui gravitent autour du prince. C'est ainsi que Haydn, le compositeur de renom, a initié le petit George au violon. Très vite l'enfant se révèle particulièrement doué et Frederik rêve de conduire son fils sur le chemin de la gloire et de la richesse, à l'image du jeune Mozart qui, sous la houlette de son père, éblouit les cours européennes. En 1789, alors que le jeune George n'a que 9 ans, Frederik décide de l'emmener à Paris pour conquérir les salles de concert et pour obtenir les faveurs du Roi de France. Mais à Paris, les troubles de la Révolution se préparent et la peau noire des Bridgewoter ne plait pas à tout le monde dans une Europe en plein débat sur l'esclavage dans les colonies. Après Paris, il y aura Londres puis le retour à Vienne, des concerts sous les vivats, des rencontres avec les plus grands musiciens et compositeurs de son temps, une amitié, même, avec Beethoven qui lui dédiera une sonate, la Sonata Mulattica, avant de la rebaptiser Sonate à Kreutzer. Pourquoi ce revirement ? Comment ce jeune noir, descendant d'esclave, est-il devenu la coqueluche des cours européennes avant de tomber de l'oubli ? Voilà ce que vous découvrirez en vous plongeant dans le nouveau roman de l'auteur de Photo de groupe au bord de fleuve.